Les cinq premiers mois du mandat de Donald Trump à la présidence ont coïncidé avec l’une des plus fortes chutes du dollar américain au cours des trois dernières décennies, la contraction économique, la montée des déficits et les tensions politiques avec la Réserve fédérale ayant fait plonger la monnaie face à la défiance des investisseurs.
La plus forte chute depuis 1991

L’indice du dollar américain, qui mesure la solidité du billet vert face à un panier de grandes devises, a chuté de plus de 10 % depuis le début de l’année, marquant ainsi la pire performance semestrielle depuis le deuxième semestre 1991.
Après avoir enregistré un puissant rebond entre fin 2024 et janvier 2025, gagnant 13 des 14 semaines, l’optimisme suscité par le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche et par ses politiques fiscales et tarifaires a été la cause directe de la forte baisse observée après le jour de l’investiture du 20 janvier.
Qu’est-ce qui a déclenché la chute du dollar ?
Les attentes initiales du marché étaient que le dollar serait plus fort sous la présidence Trump, étant donné ses promesses de réductions d’impôts et de politiques commerciales protectionnistes. Cependant, ces mesures se sont retournées contre lui.
Le vent a commencé à tourner en mars, lorsque l’euro a fortement rebondi après que le gouvernement de coalition allemand a lancé une importante expansion fiscale, abandonnant le frein à l’endettement que le pays avait maintenu pendant longtemps. Berlin a approuvé une hausse des dépenses militaires, tandis que l’Union européenne a annoncé un programme “ReArm Europe” de 800 milliards d’euros, faisant ainsi couler des capitaux dans la zone euro.
Le mois d’avril a été un double coup dur pour le billet vert. Le 2 avril, Donald Trump a introduit des tarifs douaniers généralisés – baptisés “Jour de la Libération” – contre plusieurs partenaires commerciaux. Les marchés ont reculé, ce mouvement ayant déclenché des menaces de représailles et une incertitude croissante.
Une pause de 90 jours, annoncée le 9 avril, n’a pas réussi à restaurer la confiance dans le dollar.
Les données économiques ont aggravé les problèmes du dollar. L’économie américaine a enregistré une contraction de 0,5 % au premier trimestre, ce qui constitue la première baisse depuis 2022. Dans le même temps, les inquiétudes ont augmenté concernant les conditions budgétaires du pays.
Explosion du déficit et dégradation de la dette
Moody’s a dégradé la note de la dette souveraine américaine, retirant à Washington sa dernière note AAA. L’agence de notation a mis en évidence une augmentation soutenue de la dette publique et des paiements d’intérêts sur plus de dix ans comme principales raisons de cette dégradation.
Entre-temps, le Bureau du budget du Congrès, composé de membres des deux partis politiques, a projeté que le projet de loi phare de Donald Trump, «One Big Beautiful Bill», ferait gonfler le déficit fédéral de 2,8 billions de dollars sur la prochaine décennie.
Cela se produit alors que le ratio déficit/PIB fédéral est déjà proche de 7 % et que la dette publique totale dépasse les 100 % du PIB.
Les tensions avec la Fed s’intensifient, les paris sur une baisse des taux augmentent
Le dollar a été encore plus fragilisé par l’escalade de la querelle de Donald Trump avec le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell. Après avoir critiqué à plusieurs reprises Jerome Powell au printemps, Donald Trump a indiqué ouvertement qu’il ne le réengagerait pas lorsque son mandat prendrait fin en mai 2026.
La Fed a maintenu les taux d’intérêt à leur niveau actuel pour une quatrième réunion consécutive en juin, citant les risques d’inflation liés aux tarifs douaniers. Jerome Powell a déclaré que le niveau actuel des taux d’intérêt était “approprié” compte tenu des conditions économiques, repoussant ainsi la pression politique.
En réponse, Donald Trump a violemment attaqué Jerome Powell, l’accusant de partialité politique. Plus tard en juin, il a évoqué des remplacements possibles, renforçant ainsi les attentes du marché selon lesquelles la politique monétaire aurait tendance à plus de souplesse.
Les marchés anticipent désormais deux baisses des taux d’intérêt avant la fin de l’année 2025 et quatre autres en 2026 – un changement dovish qui a encore affaibli le billet vert.
Où en est le dollar maintenant ?
Le 27 juin, l’indice du dollar américain – suivi par l’ETF Invesco DB USD Index Bullish Fund (NYSE:UUP) est tombé à 97, soit son plus bas niveau depuis février 2022, avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie. L’indice est en passe d’enregistrer sa septième séance de repli d’affilée.
Ce qui avait commencé par un optimisme sous la présidence de Donald Trump a rapidement tourné court, faisant du premier semestre 2025 le pire chapitre de l’histoire du dollar depuis près de 40 ans.

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Photo créée à l’aide d’images Shutterstock et Midjourney.