Entre 2000 et 2020, le National Health Service (NHS) du Royaume-Uni a fait face à des compromis importants dans la priorisation de nouveaux traitements médicamenteux, les ressources attribuées à ces médicaments venant souvent au détriment des gains de santé de la population dans son ensemble.
Les recherches du Lancet ont révélé que, bien que les médicaments nouvellement approuvés bénéficient directement à certains patients, l’impact global sur la santé de la population était négatif en raison des coûts élevés et de la réaffectation des ressources qui en a résulté.
Une analyse rétrospective a examiné les évaluations technologiques réalisées par l’Institut national pour la santé et l’excellence clinique (NICE) sur 332 médicaments.
Sur ce nombre, 276 (83 %) ont reçu des recommandations positives, et la plupart des médicaments ont été évalués dans les 5 ans suivant leur homologation réglementaire.
Finalement, l’étude a inclus 183 médicaments après avoir exclu les cas non éligibles. Bien que ces médicaments aient généré environ 3,75 millions d’années de vie pondérées par la qualité (QALY) pour 19,82 millions de patients, leur coût pour le NHS – pour un total de 94,93 milliards de dollars (75,1 milliards de livres sterling) – a entraîné une perte nette estimée à 1,25 million de QALY.
Par exemple, les médicaments d’oncologie ont démontré un rapport coût-efficacité médian (ICER) de 30 000 livres par QALY gagné, ce qui est beaucoup plus élevé que les 6 478 livres pour les médicaments anti-infectieux.
De plus, l’ICER pour les recommandations de nouveaux médicaments a augmenté de 32 % entre 2000 et 2020, ce qui reflète une pression financière croissante sur le NHS.
Malgré les avantages potentiels à long terme que pourraient procurer des réductions de prix après l’expiration du brevet, ces effets sont limités. Seuls 19 % des médicaments étudiés avaient des alternatives génériques ou biosimilaires d’ici 2020.
Pour que les nouveaux médicaments contribuent positivement à la santé de la population, il aurait fallu que leurs coûts initiaux subissent une réduction médiane de 42 %.
Le débat en cours sur le seuil de rentabilité de l’ICER du NICE reste au centre des discussions politiques.
Un accord de 2024 a maintenu le seuil actuel jusqu’en 2029, mais les experts plaident pour une harmonisation avec l’estimation de l’ICER du Département de la santé et des soins sociaux.
Un tel ajustement pourrait garantir que le NHS obtienne une meilleure valeur pour ses investissements dans les nouveaux médicaments sans compromettre la qualité des soins dans d’autres domaines.
Concilier l’innovation avec des résultats de santé équitables nécessite des solutions politiques nuancées. L’étude suggère que le seuil de rentabilité de l’ICER devrait être abaissé, à environ 15 000 livres par QALY, afin d’aligner davantage les dépenses sur les gains en santé.
Cependant, l’opposition de l’industrie pharmaceutique souligne les difficultés à réformer les politiques de tarification tout en favorisant l’innovation.
Cette approche met en lumière le fait que le fait de bénéficier à un groupe de patients pourrait nécessiter de les déprioriser par rapport à d’autres, car les services et traitements existants du NHS sont déplacés pour financer de nouveaux médicaments.
Par exemple, en 2010, le NICE a approuvé l’Herceptin (trastuzumab) de Roche Holding AG (OTC:RHHBY) dans le traitement du cancer gastrique métastatique, jugeant qu’un ICER de 43 206 livres par QALY gagné était rentable.
Le fait de présenter cela comme 2,88 QALY perdues pour chaque QALY gagné éclaire la valeur accordée aux patients recevant le traitement par rapport à ceux qui pourraient en être privés.
À l’échelle de la population, l’utilisation du trastuzumab dans ce contexte a entraîné une estimation de 4 000 QALY perdues entre 2010 et 2020.
Cependant, adopter cette perspective pourrait poser des défis aux décideurs politiques en raison du seuil établi de 20 000 à 30 000 livres par QALY.
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