Spaghetti servis au CERN

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Des chercheurs ont mis au point un nouvel absorbeur de particules pour l’expérience LHCb au CERN, rapporte l’Université nationale de recherche et de technologie NUST MISIS

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MOSCOU, 10 septembre 2021 /PRNewswire/ — Un groupe de chercheurs de l’université NUST MISIS a mis au point une nouvelle technologie pour la production d’un absorbeur pour le calorimètre électromagnétique pour l’expérience LHCb au CERN (Genève, Suisse). Le but de l’expérience est d’expliquer et de comprendre pourquoi l’antimatière a disparu au cours de l’évolution de l’Univers. Les propriétés uniques d’un alliage plomb-antimoine spécial et d’une technologie de cassette pour remplacer les fibres scintillantes permettront de répondre à des exigences techniques strictes, simplifiant l’entretien et prolongeant la durée de vie du calorimètre.

Pour répondre à la question de savoir pourquoi l’Univers est principalement constitué de matière, et non de parties égales de matière et d’antimatière, les chercheurs accélèrent des flux de particules élémentaires à des vitesses proches de celle de la lumière et les font entrer en collision dans des chambres spéciales. Lors de la collision de faisceaux à des énergies colossales, de nombreuses particules et antiparticules apparaissent. En même temps, l’image de leur désintégration est légèrement différente et c’est cette différence que les chercheurs tentent de trouver. Pour ce faire, chaque particule doit être détectée pendant sa désintégration, puis sa trajectoire doit être retracée et son énergie mesurée.

Pour ce faire, les flux de particules passent par un certain nombre de détecteurs différents, notamment des calorimètres (appareils permettant de mesurer l’énergie des électrons et des hadrons), qui font partie du complexe de détecteurs LHCb au CERN. Le calorimètre LHCb électromagnétique moderne comprend des modules de type « shish kebab », à savoir des couches alternées d’un scintillateur en plastique (substance qui absorbe et réfléchit l’énergie sous forme de flash de lumière) et d’un absorbeur en plomb.

L’introduction du programme d’augmentation de la luminosité de l’expérience LHCb implique le recueil de statistiques dans des modes d’augmentation de la radioactivité due à une augmentation du nombre de collisions de particules par seconde. Cela implique des exigences considérables en matière de résistance à la charge et aux radiations des systèmes expérimentaux, ainsi que des matériaux qui les composent.

Pour améliorer la résistance aux radiations et augmenter la durée de vie du calorimètre, les chercheurs ont proposé d’utiliser une nouvelle géométrie en « spaghetti », qui consiste en des fibres scintillantes orientées dans la direction de mouvement des particules secondaires. Les fibres sont enfermées dans une matrice absorbante, un absorbeur métallique.

Un groupe de chercheurs et d’ingénieurs de la NUST MISIS a mis au point et créé un prototype d’un nouvel absorbeur de type « spaghetti », fabriqué par moulage d’un alliage Garth spécial plomb-antimoine.

« Le caractère unique de la composition de l’alliage permet de ne pas avoir de contraction thermique du moulage et permet d’obtenir une viscosité minimale et la dureté requise tout en maintenant une densité élevée, nécessaire pour localiser la cascade d’électrons dans l’absorbeur. La contraction thermique est un paramètre très important car les tolérances de fabrication de ces produits sont très faibles : jusqu’à 50 micromètres. En conséquence, nous avons produit un bloc monolithique extrêmement précis », a déclaré le Docteur Dmitri Karpenkov, l’un des principaux développeurs de la technologie, chercheur principal au Laboratory of Multifunctional Magnetic Nanomaterials (Laboratoire des nanomatériaux magnétiques multifonctionnels), Professeur agrégé du Department of Functional Nanosystems and High-Temperature Materials (Département des nanosystèmes fonctionnels et des matériaux à haute température).

Le groupe scientifique a fabriqué un élément à arêtes vives d’une longueur de côté de 30,25 mm et d’une longueur totale de 320 mm, qui est une matrice métallique comportant 121 canaux longitudinaux d’un diamètre de 2,2 mm. L’épaisseur de la paroi entre ces canaux doit être strictement égale à 0,55 mm sur toute la longueur. Les développeurs soulignent que le pas entre les fibres est optimisé pour atteindre la résolution énergétique requise de l’ordre de 10 % / √E grâce à la simulation détaillée.

La technologie développée est basée sur le remplissage d’un moule en graphite avec les tiges métalliques pré-installées avec un liquide en fusion. L’utilisation d’un alliage de plomb et d’antimoine, qui présente une viscosité minimale pour ce système et une contraction thermique pratiquement nulle pendant la cristallisation, a permis de remplir tous les vides technologiques de la pièce et de répondre aux exigences les plus strictes en matière de tolérances linéaires et de forme du produit final. Après le remplissage, les tiges ont été retirées mécaniquement. Pour faciliter ce processus, chacune des tiges a été préalablement enduite de graisse graphitée.

La technologie proposée permet d’accélérer considérablement le temps de production et d’assemblage des modules de ce type. Grâce à la nouvelle solution de conception (schéma d’assemblage en cassettes), le remplacement opérationnel partiel des fibres scintillantes dégradées dans un calorimètre électromagnétique pendant l’arrêt technique annuel du complexe expérimental sera possible.

Le prototype développé du module calorimétrique avec absorbeur en plomb a été testé sur un faisceau d’électrons d’essai de l’accélérateur SPS au CERN. Au cours des essais, il a été rempli de fibres scintillantes à base de polystyrène produites par le Centre de recherche national « Kurchatov Institute » IHEP, Protvino.

« Les propriétés et les caractéristiques du prototype créé ont été testées sur des faisceaux de laboratoire au CERN. Par conséquent, un prototype du module de type « spaghetti » peut être utilisé efficacement dans le nouveau calorimètre électromagnétique LHCb. À l’heure actuelle, il est nécessaire de résoudre certains problèmes de conception, mais nous pouvons d’ores et déjà affirmer que les concepts de type « shish kebab » et de type « spaghetti », dont les conceptions sont fondamentalement différentes, peuvent se compléter efficacement dans les expériences LHCb » a conclu le principal expert scientifique de l’expérience, Andrei Golutvin.

Lien vers l’article source : https://en.misis.ru/university/news/science/2021-09/7543/.